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LES DEUX TESTAMENTS

François, gamin de treize ans, préparait ses devoirs pour le lendemain.

Pti Fonce, le bébé de la famille. gamin tapageur âgé de dix ans, agaçait son compagnon fidèle, un petit chien noir à la physionomie douce et intelligente, qui se réchauffait sous le poêle, fatigué qu’il était des courses qu’il avait faites toute, l’après midi avec son jeune maître.

Tout à coup, un pas léger se fit entendre dans l’escalier, et chacun dressa l’oreille. Emma sentait son cœur battre avec force. Une seconde plus tard on frappa à la porte, et Emma s’empressa d’aller ouvrir.

Joseph Allard, fin peu transi, mais joyeux quand même, entra.

Chacun sembla content de voir le jeune homme qui était un favori dans cette famille.

— Mais comment avez-vous fait pour vous décider à venir par un temps pareil ? lui demanda-t-on.

— C’est que j’avais envie de jouer quelques parties pour prendre ma revanche de la défaite que j’ai essuyée la semaine dernière, répondit-il gaîment.

— C’est bon, dit le père. Quand vous serez réchauffé, nous pourrons commencer.

— Oh, pour ça, je suis déjà réchauffé.

— Eh bien, commençons tout de suite, alors. Vite, Emma, emporte les cartes, ma fille.

La mère qui avait interrompu sa lecture rassembla ses feuilletons épars en une pile et se rangea pour faire place aux joueurs, qui prirent chacun leur place à table.

Le père jouait avec son fils aîné, et le visiteur, avec la jeune fille.

De temps en temps, on interrompait la partie pour causer joyeusement pendant quelques instants, puis on se remettait au jeu avec plus d’ardeur que jamais.

Cependant, Emma et Joseph Allard gagnaient toujours, ce qui piquait le bonhomme.

— Décidément, vous la prenez votre revanche, disait-il au jeune homme, de temps en temps.

— Cela dépend de ma partenaire, répondait celui ci, en adressant un aimable sourire à Emma.

La semaine dernière, si vous vous le rappelez, je jouais avec Charles Rivard. C’est lui qui me portait malchance, je crois.

Ce compliment, qui n’était qu’une banalité aimable et bien d’autres du même genre, faisaient pourtant une vive impression sur l’imagination un peu naïve d’Emma.

Aimant Joseph Allard, Joe, comme on l’appelait familièrement, avec toute l’ardeur de son âme un