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LES DEUX TESTAMENTS

son, un bruit de paroles s’échappant du salon qui ouvrait sur le véranda, attira son attention.

Instinctivement, il prêta l’oreille et c’est ainsi qu’il entendit tout le dialogue entre Marie-Louise et son père.

Enfin, ne pouvant se contenir, il s’élança dans le salon, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent.

Bernier était resté dans un état de stupéfaction profonde à l’apparition soudaine de ce fier jeune homme qui l’appelait si hardiment « mon oncle ».

Était-ce vraiment le petit Joseph qu’il avait cru mort, ce grand jeune homme, noble et beau, dont les grands yeux noirs, francs et honnêtes, le fixaient si résolument ?

C’était bien là ce regard qu’il avait tant détesté dans l’enfant, ce regard qui semblait lire jusqu’au fond de son âme.

Son instinct, plus que sa raison, lui dit que ce jeune homme devait être en effet, son neveu, et cette pensée le transporta de rage.

— Vous êtes un imposteur ! un misérable ! s’écria-t-il. Sortez d’ici ! je vous l’ordonne.

— Modérez-vous, monsieur, répondit Joe, pâle de colère, ou vous pourriez avoir sujet de vous repentir de vos paroles.

Je ne viens pas ici en ennemi.

Au contraire.

Pour l’amour de votre fille que j’aime, et de votre épouse qui a été si bonne pour moi, je préférerais, s’il est possible, me dispenser d’en appeler aux tribunaux.

Il ne tient qu’à vous de régler nos affaires à l’amiable.

Mais je dois vous prévenir que j’ai retrouvé le dernier testament de ma grand’mère, celui par lequel elle me lègue tous ses biens.

— Ce n’est pas vrai ! vous êtes un imposteur ! s’écria encore Bernier. Mde Champagne n’a fait qu’un testament.

— Elle en fit un second, quand elle découvrit votre véritable caractère : Le voici.

— Vous êtes un faussaire ! Ce testament vous l’avez fait vous-même. Je vous le dis, Mde Champagne n’a fait qu’un testament dans sa vie.

— Vous savez bien que non, dit d’une voix ferme et méprisante, Mde Bernier qui entra en ce moment, étant revenue de l’état de stupeur dans lequel son mari l’avait laissée après son retour de chez les Laplante, et qui écoutait à la porte depuis quelques instants.

Vous savez bien que lors de la lecture du testament, après la mort de votre belle-mère, un notaire se