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amour vainqueur

et apprécier davantage ! Elle ne le détestait plus ; les remarques qu’il lui avait faites, sur le compte de sa jeune sœur lui avaient fait de la peine, elle l’avait trouvé indélicat, et l’avait jugé pour un homme peu sincère et changeant, mais elle ne le détestait plus.

Elle reçut encore quelques visites, de son ami M. Burrage ; mais toute l’estime qu’elle avait pour lui, ne grandissait pas, et elle ne ressentait pas dans son cœur, le feu de l’amour qui dévore les amoureux ; souvent même, elle avait hâte de le voir partir ; de longs moments, alors qu’ils étaient assis en présence, l’un de l’autre, se passaient dans le silence ; elle avait beau chercher des sujets qui pouvaient l’intéresser, la conversation était toujours pour elle, ennuyeuse, languissante et traînante ! Une semaine après, comme Ninie ne recevait aucune nouvelle de Rogers, comme elle se voyait trompée dans ce qu’il y a de plus noble, dans toute son existence, marchant sans but, sans destination, indécise et incomprise ! comme elle ne pouvait se décider à unir sa destinée, à celle de cet ami, bon citoyen pourtant, M. Burrage, elle réunit dans sa mémoire et dans son cœur, tous ses souvenirs, tous ceux qui lui étaient les plus agréables, ceux surtout lui rappelant tous les beaux moments passés avec son Rogers, et décida de se retirer des amusements de la société, pour ne plus vivre désormais que de la joie de ses souvenirs !

Pourtant, elle était encore bien jeune ! vingt quatre ans n’avaient pas encore fait disparaître la grâce et la beauté de ses sourires.

Mais, aimer par la raison, ce M. Burrage pour qui, son cœur n’éprouvait aucun amour ! Elle ne pouvait s’y résoudre, car c’était risquer son bonheur pour la vie ! elle avait bien pour lui de l’estime, elle le trouvait bon, doux, ses connaissances étaient vastes ; par certains moments, quand il n’avait pas la tête trop occupée aux affaires, il était même aimable et intéressant en conversation ; mais, en faire son époux, son confident, entre les mains de qui elle déposerait le trésor de son amour et de ses serments les plus sacrés, c’était chose impossible ; elle ne pouvait s’y résoudre.

La résolution qu’elle prit de refuser les visites de M. Burrage, la porta à penser de nouveau, à son ancien ami Rogers ;