Page:Dussault - Amour vainqueur, 1915.djvu/115

Cette page a été validée par deux contributeurs.
95
amour vainqueur

 Les corrections sont expliquées en page de discussion

À ce moment Harry pâlit, et voyant les musiciens qui reprenaient leurs devoirs, il dit :

Ninie, ma chère amie, vous voulez donc me quitter ?

Non, dit-elle, mais pour le moment, je veux retourner à mon foyer, étudier avec ma mère cette question que vous me posez ; car je ne suis pas prête à essayer, sans consulter ma mère, de vous rendre heureux ; vos ambitions dit-elle, mon cher ami, ne sont pas tout-à-fait les miennes, vos rêves ne sont pas les miens ; je sais que vous avez de l’argent, que vous m’avez porté considération et estime, et je puis ajouter sans orgueil, que ce n’est pas sans à propos, car j’ai cherché par tous les moyens, à me rendre digne de vous. Vous m’avez aimée, je vous ai aimé ! mais le plus nous nous connaissons, le moins nous nous aimons, je crois ; et en vue de notre bonheur commun, je m’attarde à réfléchir, et oser croire qu’une séparation serait aussi bonne, que la continuation d’un amour obligé de souffrir la rivalité d’un autre amour.

Séparons-nous, soit, dit Harry, puisque c’est là votre désir, mais en attendant, un tour de valse.

L’atmosphère rempli des parfums des bouquets qu’on avait disséminés tout autour de la salle, répercutait les échos joyeux des instruments de l’orchestre, et les convives comme transportés dans le tourbillon des rires de la jeunesse, et enivrés de joie, répondaient aux notes de la musique, et se berçaient d’illusions faisant oublier les chagrins.

La jeune fille était tout de même, toute stupéfaite du changement de l’état d’âme de Harry ; peut-être ne l’avait-elle pas connu, tel qu’il était ? Harry se montrait plus généreux, plus délicat, plus affectueux et plus idéaliste qu’elle ne l’avait jamais cru !

Ninie, vous ne m’aimez donc plus, dit Harry, après quelques moments de silence, en terminant sa valse ?

— Oh ! Harry, vous me faites souffrir.

Répondez-moi, dit-il avec ténacité.

Vous répondre, Harry, m’obligerait à vous parler plus longuement, que je ne puis faire ici, maintenant en présence de cette assistance qui, toute joyeuse et occupée à se divertir, me