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côtés et l’on est convaincu que, par ce moyen, les poux naîtront nombreux. Chez les Mara, c’est en dispersant de la poussière détachée de pierres sacrées, qu’on procède à l’Intichiuma des abeilles[1]. Pour le kangourou des plaines on emploie une méthode légèrement différente. On prend de la bouse de kangourou ; on l’enveloppe dans une certaine herbe dont cet animal est très friand et qui, pour cette raison, ressortit au totem du Kangourou. On dépose la bouse, ainsi enveloppée, sur le sol entre deux couches de cette même herbe et on met le feu au tout. Avec la flamme qui se dégage, on allume des branches d’arbres que l’on agite ensuite de manière à ce que les étincelles s’en aillent dans toutes les directions. Ces étincelles jouent le même rôle que la poussière dans les cas précédent[2].

Dans un certain nombre de clans[3], pour rendre le rite plus efficace, les hommes mêlent à la substance de la pierre quelque chose de leur propre substance. Des jeunes gens s’ouvrent les veines et laissent leur sang s’écouler à flots sur le rocher. C’est ce qui arrive notamment dans l’Intichiurna de la fleur Hakea, chez les Arunta. La cérémonie a lieu dans un endroit sacré, autour d’une pierre également sacrée, qui représente, aux yeux des indigènes, des fleurs Hakea. Après quelques opérations préliminaires, « le vieillard qui dirige l’exécution du rite invite un jeune homme à s’ouvrir les veines. Celui-ci obéit et laisse son sang se répandre librement sur la pierre, tandis que les assistants continuent à chanter. Le sang coule jusqu’à ce que la pierre en soit complètement couverte »[4]. L’objet de cette pratique est de revivifier, en quelque sorte, les vertus de la pierre et d’en renforcer l’efficacité. Il ne faut pas

  1. North. Tr., p. 312.
  2. Ibid.
  3. Nous verrons plus loin que ces clans sont beaucoup plus nombreux que ne le disent Spencer et Gillen.
  4. Nat. Tr., p. 184-185.