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déterminer qu’au terme de la recherche. Mais ce qui est nécessaire et possible, c’est d’indiquer un certain nombre de signes extérieurs, facilement perceptibles, qui permettent de reconnaître les phénomènes religieux partout où ils se rencontrent, et qui empêchent de les confondre avec d’autres. C’est à cette opération préliminaire que nous allons procéder.

Mais pour qu’elle donne les résultats qu’on en peut attendre, il faut commencer par libérer notre esprit de toute idée préconçue. Les hommes ont été obligés de se faire une notion de ce qu’est la religion, bien avant que la science des religions ait pu instituer ses comparaisons méthodiques. Les nécessités de l’existence nous obligent tous, croyants et incrédules, à nous représenter de quelque manière ces choses au milieu desquelles nous vivons, sur lesquelles nous avons sans cesse des jugements à porter et dont il nous faut tenir compte dans notre conduite. Seulement, comme ces prénotions se sont formées sans méthode, suivant les hasards et les rencontres de la vie, elles n’ont droit à aucun crédit et doivent être rigoureusement tenues à l’écart de l’examen qui va suivre. Ce n’est pas à nos préjugés, à nos passions, à nos habitudes que doivent être demandés les éléments de la définition qui nous est nécessaire ; c’est à la réalité même qu’il s’agit de définir.

Mettons-nous donc en face de cette réalité. Laissant de côté toute conception de la religion en général, considérons les religions dans leur réalité concrète et tâchons de dégager ce qu’elles peuvent avoir de commun ; car la religion ne se peut définir qu’en fonction des caractères qui se retrouvent partout où il y a religion. Dans cette comparaison, nous ferons donc entrer tous les systèmes religieux que nous pouvons connaître, ceux du présent et ceux du passé, les plus primitifs et les plus simples aussi bien que les plus récents et les plus raffinés ; car nous n’avons aucun droit ni aucun moyen logique d’exclure les uns pour ne retenir