i50 LE SU1CIT>K. du groupe professionnel la hase de notre organisation politique, o/est-à-dire diviser le collèf^e électoral, non par circonscriplions i territoriales, mais par corporations. Seulement, pour cela, il faut commencer par or^^’lniser la corporation. Il faut qu’elle soit autre chose qu’un assemblage d’individus qui se rencontrent au jour du vote sans avoir rien de commun entre eux. Elle ne l^ourra remplir le rôle qu’on lui destine que si, au lieu de rester lin être de convention, elle devient une institution définie, une personnalité collective, ayant ses mœurs et ses traditions, ses droits et ses devoirs, son unité. La grande difficulté n’est pas de décider par décret que les représentants seront nommés par profession et combien chacune en aura, mais de faire en sorte que chaque corporation devienne une individualité morale. Au- trement, on ne fera qu’ajouter un cadre extérieur et factice à ceux qui existent et que l’on veut remplacer. Ainsi, une monographie du suicide a une portée qui dépasse l’ordre particulier de faits qu’elle vise spécialement. Les ques- tions qu’elle soulève sont solidaires des plus graves problèmes 1 pratiques qui se posent à l’heure présente. Les progrès anor- l maux du suicide et le malaise général dont sont atteintes les so- 1 ciétés contemporaines dérivent des mêmes causes. Ce que prouve ce nombre exceptionnellement élevé de morts volontaires, c’est l’état de perturbation profonde dont souffrent les sociétés civili- sées et il en atteste la gravité. On peut même dire qu’il en donne la mesure. Quand ces souffrances s’expriment par la bouche d’un théoricien, on peut croire qu’elles sont exagérées et infi- dèlement traduites. Mais ici, dans la statistique des suicides, elles viennent comme s’enregistrer d’elles-mêmes, sans laisser. di) place à l’appréciation personnelle. On ne peut donc enrayer ro courant de tristesse collective qu’en atténuant, tout au moins, la maladie collective dont il est la résultante et le signe. Nous avons montré que, pour atteindre ce but, il n’était nécessaire ni (le restaurer artificiellement des formes sociales surannées et auxquelles on ne pourrait communiquer qu’une apparence de vie, ni d’inventer de toutes pièces des formes entièrement neuves et sans analogies dans l’histoire. Ce qu’il faut, c’est rechcher
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