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lendit donc, par la force des choses, à absorber en lui toutes
les formes d’activité qui pouvaient présenter un caractère social, et il n’y eut plus en face de lui qu’une poussière inconsistante d’individus. Mais alors, il fut par cela même nécessité à se sur- charger de fonctions auxquelles il était impropre et dont il n’a pas pu s’acquitter utilement. Car c’est une remarque souvent faite qu’il est aussi envahissant qu’impuissant. Il fait un effort maladif pour s’éteudre à toutes sortes de choses qui lui échap- pent ou dont il ne se saisit qu’en les violentant. De là ce gaspil- lage de forces qu’on lui reproche et qui est, en effet, sans rap- port avec les résultats obtenus. D’un autre côté, les particuliers ne sont plus soumis à d’autre action collective que la sienne, puisqu’il est la seule collectivité organisée. C’est seulement par son intermédiaire qu’ils sentent la société et la dépendance où ils sont vis-à-vis d’elle. Mais, comme l’État est loin d’eux, il ne peut avoir sur eux qu’une action lointaine et discontinue; c’est pourquoi ce sentiment ne leur est présent ni avec la suite ni avec l’énergie nécessaires. Pendant la plus grande partie de leur existence, il n’y a rien autour d’eux qui les tire hors d’eux- mêmes et leur impose un frein. Dans ces conditions, il est iné- vitable qu’ils sombrent dans l’égoïsme ou dans le dérèglement. L’homme ne peut s’attacher à des fins qui lui soient supérieures et se soumettre à une règle, s’il n’aperçoit au-dessus de lui rien dont il soit solidaire. Le libérer de toute pression sociale, c’est l’abandonner à lui-même et le démorahser. Tels sont, en effet, 1 les deux caractéristiques de notre situation morale. Tandis que l’État s’entle et s’hypertrophie pour arriver à enserrer assez fortement les individus, mais sans y parvenir, ceux-ci, sans liens entre eux, roulent les uns sur les autres comme autant de mo- lécules liquides, sans rencontrer aucun centre de forces qui les retienne, les fixe et les organise. De temps en temps, pour remédier au mal, on propose de restituer aux groupements locaux quelque chose de leur an- cienne autonomie; c’est ce qu’on appelle décentraliser. Mais la seule décentralisation vraiment utile est celle qui produirait en même temps une plus grande concentration des forces so-