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amende qui peut monter jusqu’à 200 dollars, soit à l'une et à l’autre peine à la fois. Le seul fait de conseiller le suicide ou d’en favoriser l’accomplissement est assimilé à la complicité de meurtre (*),

Les sociétés mahométanes ne prohibent pas moins énergiquement le suicide. « L’homme, dit Mahomet, ne meurt que par la volonté de Dieu d’après le livre qui fixe le terme de sa vie (2) ». — « Lorsque le terme sera arrivé, ils ne sauront ni le retarder ni l’avancer d’un seul instant i^) ». — « Nous avons arrêté que la mort vous frappe tour à tour et nul ne saurait prendre le pas sur nous (*) ». — Rien, en effet, n’est plus contraire que le suicide à l’esprit général de la civilisation mahométane ; car la vertu qui est mise au-dessus de toutes les autres, c’est la soumission absolue à la volonté divine, la résignation docile « qui fait supporter tout avec patience (^) ». Acte d’insubordination et de révolte, le suicide ne pouvait donc être regardé que comme un manquement grave au devoir fonda- mental.

Si, des sociétés modernes, nous passons à celles qui les ont précédées dans l’histoire, c’est-à-dire aux cités gréco-latines, nous y trouvons également une législation du suicide, mais qui ne repose pas tout à fait sur le même principe. Le suicide n’était regardé comme illégitime que s’il n’était pas autorisé par l’Etat. Ainsi, à Athènes, l’homme qui s’était tué était frappé d’atimia comme ayant commis une injustice à l’égard de la cité (6) ; les honneurs de la sépulture régulière lui étaient refusés ; de plus, la main du cadavre était coupée et enterrée à partC’). Avec des variantes de détail, il en était de même à Thèbes, à

(1) Ferri, op. cit, p. 63, 64.

(2) Coran, III, v. 139.

(3) Ibid,, XVI, V. 63.

(4) Ibid,, LVI, V. 60.

(5) Ibid., XXXIII, V. 33.

(6) Aristote, Eth. Nie, V, 11, 3.

(7) Eschine, C. Ctésiphon, p. 244. — PlatoD, Lois, IX, 12, p. 873.