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LE SUICIDE ANOMIQUE. 297 Nous n’avons pu nous procurer le chiffre des divorces dans le grand-duché d’Oldenbourg. Cependant, étant donné que c’est un pays protestant, on peut croire qu’ils y sont fréquents, sans l’être pourtant avec excès ; car la minorité catholique est assez importante. Il doit donc, à ce point de vue, être à peu près au même, rang que Bade et que la Prusse. Or il se classe aussi au même rang au point de vue de l’immunité dont y jouissent les époux; 100.000 céHbataires au delà de 15 ans donnent annuel- lement S2 suicides, 100.000 époux en commettent 66. Le coef- ficient de préservation pour ces derniers est donc de 0,79, très différent, par conséquent, de celui que l’on observe dans les pays catholiques où le divorce est rare ou inconnu. La France nous fournit l’occasion de faire une observation qui confirme les précédentes, d’autant mieux qu’elle a plus de rigueur encore. Les divorces sont beaucoup plus fréquents dans la Seine que dans le reste du pays. En 1885, le nombre des divorces prononcés y était de 23,99 pour 10.000 ménages réguliers alors que, pour toute la France, la moyenne n’était que de 5,65. Or, il suffit de se reporter au tableau XXII pour constater que le coefficient de préservation des époux est sen- siblement moindre dans la Seine qu’en province. Il n’y atteint, en effet, 3 qu’une seule fois, c’est pour la période de 20 à 25 ans ; et encore l’exactitude du chiffre est-elle douteuse, car il est calculé d’après un trop petit nombre de cas, attendu qu’il n’y a guère annuellement qu’un suicide d’époux à cet âge. A partir de 30 ans, le coefficient ne dépasse pas 2, il est le plus souvent au-dessous et il devient même inférieur à l’unité entre 60 et 70 ans. En moyenne, il est de 1,73. Dans les départements, au gligeant Faction de ce facteur, nous avons bien diminué la valeur absolue des coefficients de préservation, mais, comme nous les avons partout diminués selon la même proportion, nous n’avons pas altéré leur valeur relative qui, seule, nous importe. Car nous ne cherchons pas à estimer en valeur absolue rimmunité des époux dans chaque pays, mais à classer les différents pays au point de vue de cette immunité. Quant aux raisons qui nous ont déterminé à cette simplification, c’est d’abord pour ne pas compliquer le problème inu- tilement, mais c’est aussi parce que nous n’avons pas dans tous les cas les éléments nécessaires pour calculer exactement l’action de l’âge.