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CHAPITRE II

SOLIDARITÉ MÉCANIQUE OU PAR SIMILITUDES


I

Le lien de solidarité sociale auquel correspond le droit répressif est celui dont la rupture constitue le crime ; nous appelons de ce nom tout acte qui, à un degré quelconque, détermine contre son auteur cette réaction caractéristique qu’on nomme la peine. Chercher ce qu’est ce lien, c’est donc se demander quelle est la cause de la peine, ou, plus clairement, en quoi le crime consiste essentiellement.

Il y a sans doute des crimes d’espèces différentes ; mais entre toutes ces espèces il y a non moins sûrement quelque chose de commun. Ce qui le prouve, c’est que la réaction qu’ils déterminent de la part de la société, à savoir la peine, est, sauf les différences de degrés, toujours et partout la même. L’unité de l’effet révèle l’unité de la cause. Non seulement entre tous les crimes prévus par la législation d’une seule et même société, mais entre tous ceux qui ont été ou qui sont reconnus et punis dans les différents types sociaux, il existe assurément des ressemblances essentielles. Si différents que paraissent au premier abord les actes ainsi qualifiés, il est impossible qu’ils n’aient pas quelque fond commun. Car ils affectent partout de la même manière la conscience morale des nations et produisent partout la même conséquence. Ce sont tous des crimes, c’est-à dire des actes réprimés par des châtiments définis. Or, les propriétés