Page:Durkheim - De la division du travail social.djvu/467

Cette page a été validée par deux contributeurs.

CONCLUSION


I


Nous pouvons maintenant résoudre le problème pratique que nous nous sommes posé au début de ce travail.

S’il est une règle de conduite dont le caractère moral n’est pas contesté, c’est celle qui nous ordonne de réaliser en nous les traits essentiels du type collectif. C’est chez les peuples inférieurs qu’elle atteint son maximum de rigueur. Là, le premier devoir est de ressembler à tout le monde, de n’avoir rien de personnel ni en fait de croyances, ni en fait de pratiques. Dans les sociétés plus avancées, les similitudes exigées sont moins nombreuses ; il en est pourtant encore, nous l’avons vu, dont l’absence nous constitue en état de faute morale. Sans doute, le crime compte moins de catégories différentes ; mais, aujourd’hui comme autrefois, si le criminel est l’objet de la réprobation, c’est parce qu’il n’est pas notre semblable. De même, à un degré inférieur, les actes simplement immoraux et prohibés comme tels sont ceux qui témoignent de dissemblances moins profondes, quoique encore graves. N’est-ce pas d’ailleurs cette règle que la morale commune exprime, quoique dans un langage un peu différent, quand elle ordonne à l’homme d’être un homme dans toute l’acception du mot, c’est-à-dire d’avoir toutes les idées et tous les sentiments qui constituent une conscience humaine ? Sans doute, si l’on prend la formule à la lettre, l’homme qu’elle nous prescrit d’être serait l’homme en général et non celui de