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En d’autres termes, quand les changements rythmiques de la machine sont rapides, les actions et les réactions qu’ils exercent les uns sur les autres sont régulières et tous les mouvements sont bien intégrés ; mais, à mesure que la vitesse diminue, des irrégularités se produisent, les mouvements se désintègrent[1]. »

Ce qui fait que tout accroissement de l’activité fonctionnelle détermine un accroissement de solidarité, c’est que les fonctions d’un organisme ne peuvent devenir plus actives qu’à condition de devenir aussi plus continues. Considérez-en une en particulier. Comme elle ne peut rien sans le concours des autres, elle ne peut produire davantage que si les autres aussi produisent plus ; mais le rendement de celles-ci ne peut s’élever, à son tour, que si celui de la précédente s’élève encore une fois par un nouveau contre-coup. Tout surcroît d’activité dans une fonction, impliquant un surcroît correspondant dans les fonctions solidaires, en implique un nouveau dans la première : ce qui n’est possible que si celle-ci devient plus continue. Bien entendu, d’ailleurs, ces contre-coups ne se produisent pas indéfiniment ; mais un moment arrive où l’équilibre s’établit de nouveau. Si les muscles et les nerfs travaillent davantage, il leur faudra une alimentation plus riche, que l’estomac leur fournira à condition de fonctionner plus activement ; mais, pour cela, il faudra qu’il reçoive plus de matériaux nutritifs à élaborer, et ces matériaux ne pourront être obtenus que par une nouvelle dépense d’énergie nerveuse ou musculaire. Une production industrielle plus grande nécessite l’immobilisation d’une plus grande quantité de capital sous forme de machines ; mais ce capital, à son tour, pour pouvoir s’entretenir, réparer ses pertes, c’est-à-dire payer le prix de son loyer, réclame une production industrielle plus grande. Quand le mouvement qui anime toutes les parties d’une machine est très rapide, il est ininterrompu parce qu’il passe sans relâche des unes aux autres. Elles s’entraînent mutuellement, pour ainsi

  1. Spencer, Principes de biologie, II, 131.