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de la division du travail la profession du criminel et les autres professions nuisibles. Elles sont la négation même de la solidarité, et pourtant elles sont constituées par autant d’activités spéciales. Mais, à parler exactement, il n’y a pas ici division du travail, mais différenciation pure et simple, et les deux termes demandent à n’être pas confondus. C’est ainsi que le cancer, les tubercules accroissent la diversité des tissus organiques sans qu’il soit possible d’y voir une spécialisation nouvelle des fonctions biologiques[1]. Dans tous ces cas, il n’y a pas partage d’une fonction commune : mais, au sein de l’organisme, soit individuel, soit social, il s’en forme un autre qui cherche à vivre aux dépens du premier. Il n’y a même pas de fonction du tout ; car une manière d’agir ne mérite ce nom que si elle concourt avec d’autres à l’entretien de la vie générale. Cette question ne rentre donc pas dans le cadre de notre recherche.

Nous ramènerons à trois types les formes exceptionnelles du phénomène que nous étudions. Ce n’est pas qu’il ne puisse y en avoir d’autres ; mais celles dont nous allons parler sont les plus générales et les plus graves.


I

Un premier cas de ce genre nous est fourni par les crises industrielles ou commerciales, par les faillites qui sont autant de ruptures partielles de la solidarité organique ; elles témoignent en effet que, sur certains points de l’organisme, certaines fonctions sociales ne sont pas ajustées les unes aux autres. Or, à mesure que le travail se divise davantage, ces phénomènes semblent devenir

  1. C’est une distinction que ne fait pas M. Spencer ; il semble que pour lui les deux termes soient synonymes. Cependant la différenciation qui désintègre (cancer, microbe, criminel) est bien différente de celle qui concentre les forces vitales (division du travail).