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cement leur action. C’est grâce à cette constance qu’il acquiert une fixité qui en fait le centre de gravité de l’influence héréditaire. Les caractères qui le constituent sont ceux qui ont le plus de résistance, qui tendent à se transmettre avec le plus de force et de précision ; ceux au contraire qui s’en écartent ne survivent que dans un état d’indétermination d’autant plus grande que l’écart est plus considérable. Voilà pourquoi les déviations qui se produisent ne sont jamais que passagères et ne parviennent même à se maintenir pour un temps que d’une manière très imparfaite.

Toutefois, cette explication même, d’ailleurs un peu différente de celle qu’a proposée M. Galton lui-même, permet de conjecturer que sa loi, pour être parfaitement exacte, aurait besoin d’être légèrement rectifiée. En effet, le type moyen de nos ascendants ne se confond avec celui de notre génération que dans la mesure où la vie moyenne n’a pas changé. Or, en fait, des variations se produisent d’une génération à l’autre qui entraînent des changements dans la constitution du type moyen. Si les faits recueillis par M. Galton semblent néanmoins confirmer sa loi telle qu’il l’a formulée, c’est qu’il ne l’a guère vérifiée que pour des caractères physiques qui sont relativement immuables, comme la taille ou la couleur des yeux. Mais si l’on observait d’après la même méthode d’autres propriétés, soit organiques, soit psychiques, il est certain qu’on s’apercevrait des effets de l’évolution. Par conséquent, à parler à la rigueur, les caractères dont le degré de transmissibilité est maximum ne sont pas ceux dont l’ensemble constitue le type moyen d’une génération donnée, mais ceux que l’on obtiendrait en prenant la moyenne entre les types moyens des générations successives. Sans cette rectification, d’ailleurs, on ne saurait s’expliquer comment la moyenne du groupe peut progresser ; car si l’on prend à la lettre la proposition de M. Galton, les sociétés seraient toujours et invinciblement ramenées au même niveau puisque le type moyen de deux générations, même éloignées l’une de l’autre, serait identique.