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particuliers qui le forment, c’est-à-dire de chaque activité fonctionnelle et de ses produits.

Les faits qui suivent confirment cette induction.

C’est une vérité établie que le degré de simplicité des faits psychiques donne la mesure de leur transmissibilité. En effet, plus les états sont complexes, plus ils se décomposent facilement parce que leur grande complexité les maintient dans un état d’équilibre instable. Ils ressemblent à ces constructions savantes dont l’architecture est si délicate qu’il suffit de peu de chose pour en troubler gravement l’économie ; à la moindre secousse, l’édifice ébranlé s’écroule mettant à nu le terrain qu’il recouvrait. C’est ainsi que, dans les cas de paralysie générale, le moi se dissout lentement jusqu’à ce qu’il ne reste plus, pour ainsi dire, que la base organique sur laquelle il reposait. D’ordinaire, c’est sous le choc de la maladie que se produisent ces faits de désorganisation. Mais on conçoit que la transmission séminale doit avoir des effets analogues. En effet, dans l’acte de la fécondation, les caractères strictement individuels tendent à se neutraliser mutuellement ; car, comme ceux qui sont spéciaux à l’un des parents ne peuvent se transmettre qu’au détriment de l’autre, il s’établit entre eux une sorte de lutte d’où il est impossible qu’ils sortent intacts. Mais plus un état de conscience est complexe, plus il est personnel, plus il porte la marque des circonstances particulières dans lesquelles nous avons vécu, de notre sexe, de notre tempérament. Par les parties inférieures et fondamentales de notre être nous nous ressemblons beaucoup plus que par ces sommets ; c’est par ces derniers au contraire que nous nous distinguons les uns des autres. Si donc ils ne disparaissent pas complètement dans la transmission héréditaire, du moins ils ne peuvent survivre qu’effacés et affaiblis.

Or, les aptitudes sont d’autant plus complexes qu’elles sont plus spéciales. C’est en effet une erreur de croire que notre activité se simplifie à mesure que nos tâches se délimitent. Au contraire, c’est quand elle se disperse sur une multitude d’objets