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configuration du territoire, ni dans la structure des assemblées du peuple. Les comitia curiata, où elle jouait un rôle social[1], sont remplacés ou par les comitia centuriata, ou par les comitia tributa, qui étaient organisés d’après de tout autres principes. Ce n’est plus qu’une association privée qui se maintient par la force de l’habitude, mais qui est destinée à disparaître, parce qu’elle ne correspond plus à rien dans la vie des Romains. Mais aussi, dès l’époque de la loi des XII Tables, la division du travail était beaucoup plus avancée à Rome que chez les peuples précédents, et la structure organisée plus développée : on y trouve déjà d’importantes corporations de fonctionnaires (sénateurs, chevaliers, collège de pontifes, etc.), des corps de métier[2], en même temps que la notion de l’état laïque se dégage.

Ainsi se trouve justifiée la hiérarchie que nous avons établie d’après d’autres critères, moins méthodiques, entre les types sociaux que nous avons précédemment comparés. Si nous avons pu dire que les Juifs du Pentateuque appartenaient à un type social moins élevé que les Francs de la loi salique, et que ceux-ci, à leur tour, étaient au-dessous des Romains des XII Tables, c’est qu’en règle générale, plus l’organisation segmentaire à base de clans est apparente et forte chez un peuple, plus aussi il est d’espèce inférieure ; il ne peut en effet s’élever plus haut qu’après avoir franchi ce premier stade. C’est pour la même raison que la cité athénienne, tout en appartenant au même type que la cité romaine, en est cependant une forme plus primitive : c’est que l’organisation politico-familiale y a disparu beaucoup moins vite. Elle y a persisté presque jusqu’à la veille de la décadence[3].

  1. Dans ces comices, le vote se faisait par curie, c’est-à-dire par groupe de gentes. Un texte semble même dire qu’à l’intérieur de chaque curie on votait par gentes. (Gell., XV, 27, 4.)
  2. V. Marquardt, Privat Leben der Roemer, II, p. i. Les premiers collèges d’artisans furent fondés par Numa.
  3. Jusqu’à Clisthéne ; or, deux siècles après Athènes perdait son indépendance. De plus, même après Clisthène, le clan athénien, le γένος, tout en ayant