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rieure qui se trouve ainsi constituée. Les services proprement professionnels que rend cette dernière sont donc pour peu de chose dans la puissance extraordinaire dont elle est investie. Ce n’est pas, comme on l’a dit, parce que ces sortes de sociétés ont plus besoin de direction que les autres que le pouvoir directeur y a tant d’autorité ; mais cette force est tout entière une émanation de la conscience commune, et, si elle est grande, c’est parce que la conscience commune elle-même est très développée. Supposez qu’elle soit plus faible ou seulement qu’elle embrasse une moindre partie de la vie sociale, la nécessité d’une fonction régulatrice suprême ne sera pas moindre ; cependant, le reste de la société ne sera plus vis-à-vis de celui qui en sera chargé dans le même état d’infériorité. Voilà pourquoi la solidarité est encore mécanique tant que la division du travail n’est pas plus développée. C’est même dans ces conditions qu’elle atteint son maximum d’énergie : car l’action de la conscience commune est plus forte quand elle s’exerce, non plus d’une manière diffuse, mais par l’intermédiaire d’un organe défini.

Il y a donc une structure sociale de nature déterminée, à laquelle correspond la solidarité mécanique. Ce qui la caractérise, c’est qu’elle est un système de segments homogènes et semblables entre eux.


II


Tout autre est la structure des sociétés où la solidarité organique est prépondérante.

Elles sont constituées, non par une répétition de segments similaires et homogènes, mais par un système d’organes différents dont chacun a un rôle spécial, et qui sont formés eux-mêmes de parties différenciées. En même temps que les éléments sociaux ne sont pas de même nature, ils ne sont pas disposés de la même manière, ils ne sont ni juxtaposés linéairement comme