Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/8

Cette page a été validée par deux contributeurs.


I


Durkheim n’a pas partagé son temps ni sa pensée entre deux activités distinctes, coordonnées l’une à l’autre d’une manière accidentelle. C’est par le côté où elle est un fait social qu’il aborde l’éducation : sa doctrine de l’éducation est un élément essentiel de sa sociologie. « Sociologue, dit-il, c’est surtout en sociologue que je vous parlerai d’éducation. D’ailleurs, bien loin qu’à procéder ainsi on s’expose à voir et à montrer les choses par un biais qui les déforme, je suis, au contraire, convaincu qu’il n’est pas de méthode plus apte à mettre en évidence leur véritable nature. » L’éducation est chose éminemment sociale.

L’observation le prouve. D’abord, dans chaque société, il y a autant d’éducations spéciales qu’il y a de milieux sociaux différents. Et, même dans des sociétés égalitaires comme les nôtres, qui tendent à éliminer les différences injustes, l’éducation varie et doit nécessairement varier, selon les professions. Sans doute, toutes ces éducations spéciales reposent sur une base commune. Mais cette éducation commune varie d’une société à l’autre. Chaque société se fait un certain idéal de l’homme. C’est cet idéal « qui est le pôle de l’éducation ». Pour chaque société, l’éducation est « le moyen par lequel elle prépare dans le cœur des enfants les conditions essentielles de sa propre existence ». Ainsi, « chaque type de peuple a son éducation qui lui est propre et qui peut servir à le définir au même titre que son organisation morale, politique et religieuse ». L’observation des faits conduit donc à la définition suivante : « L’éducation est l’action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l’enfant un certain nombre d’états physiques, intellectuels et moraux