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recherches qu’il avait entreprises, la documentation sur laquelle il s’était appuyé. Qu’on n’oublie pas, avant de juger l’œuvre, qu’il n’a guère consacré, à ce sujet immense, qu’une ou deux années de travail. Tel quel, ce cours est un modèle incomparable de ce que peut donner l’application, aux choses de l’éducation, de la méthode sociologique. C’est le seul exemple achevé qu’ait pu laisser Durkheim de l’analyse historique d’un système d’institutions scolaires.

Pour savoir ce qu’est l’enseignement secondaire actuel de la France, Durkheim observe comment il s’est formé. Les cadres datent du moyen âge, qui a vu naître les Universités. C’est au sein de l’Université, par l’internement progressif, dans les collèges, de l’enseignement donné à la Faculté des arts, que l’enseignement secondaire a pris naissance, en se différenciant de l’enseignement supérieur. Ainsi s’expliquent leurs affinités : l’un prépare à l’autre. L’enseignement dialectique est, au moyen âge, la propédeutique générale, parce que la dialectique est alors la méthode universelle ; enseignement formel, culture générale donnée à l’aide d’une discipline très spéciale, il a déjà les caractères que gardera, dans tout le cours de son histoire, l’enseignement secondaire. Mais, si les cadres sont constitués dès le moyen âge, la discipline éducative change au xvie siècle : à la logique se substituent les humanités gréco-latines. Originaire de la Renaissance, l’humanisme, en France, a été mis en œuvre surtout par les Jésuites. Ils lui ont imprimé leur marque propre ; et, bien que leurs rivaux, Oratoire, Port-Royal, Université, aient tempéré leur système, c’est l’humanisme, tel que l’ont compris les Jésuites, qui a été l’éducateur par excellence de l’esprit classique français. Dans aucune société européenne, l’influence de l’humanisme n’a été aussi exclusive : notre esprit national, par quelques-uns de ses caractères domina-