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V


L’éducation intellectuelle élémentaire ressortit à deux types, l’enseignement primaire pour la masse, l’enseignement secondaire pour l’élite. C’est l’éducation de l’élite qui soulève, dans la France contemporaine, les problèmes les plus embarrassants. Depuis plus d’un siècle, notre enseignement secondaire traverse une crise, dont l’issue est encore incertaine. On peut parler, sans exagération, de la question sociale de l’enseignement secondaire. Quelle est exactement sa nature, et quel est son rôle ? Quelles causes ont déterminé la crise, en quoi consiste-t-elle au juste, comment peut-on prévoir qu’elle se dénouera ? C’est à traiter ces questions que Durkheim a consacré un de ses plus beaux cours, sur l’Évolution et le Rôle de l’Enseignement secondaire en France : cours qu’il a professé plusieurs fois et dont il a laissé deux rédactions achevées. Il l’avait entrepris à la demande du recteur Liard, quand celui-ci voulut organiser, pour la première fois, un enseignement pédagogique à l’usage des futurs professeurs de l’enseignement secondaire. Destiné aux candidats à toutes les agrégations, tant scientifiques que littéraires, il avait pour but, dans la pensée de Durkheim, d’éveiller, en même temps, chez tous, le sentiment de la tâche commune : sentiment indispensable, si l’on veut que des disciplines diverses concourent à un enseignement qui, comme l’esprit qu’il forme, doit avoir son unité, il est vraisemblable que les futurs professeurs de l’enseignement secondaire sentiront un jour, d’eux-mêmes, le besoin de réfléchir méthodiquement, sous la direction d’un maître, à la nature et à la fonction propres de l’institution qu’ils ont à faire vivre. Et ce jour-là, le cours de Durkheim apparaîtra comme le guide le plus sûr pour cette réflexion. Son auteur estimait insuffisantes, sur plusieurs points, les