Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/105

Cette page a été validée par deux contributeurs.

temps, on sera dans de meilleures conditions pour apercevoir quelles sont ces causes, et, par conséquent, pour juger de la portée véritable de ce mouvement. Mais, d’un autre côté, ce courant pédagogique s’est constitué en opposition avec un courant contraire, celui de l’enseignement humaniste et livresque. On ne pourra donc apprécier sainement le premier qu’à condition de connaître aussi le second ; et nous voilà obligés de remonter bien plus haut encore dans l’histoire. Cette histoire de la pédagogie, pour porter tous ses fruits, ne doit pas, d’ailleurs, être séparée de l’histoire de l’enseignement. Bien que nous les ayons distinguées dans l’exposition, elles sont, en réalité, solidaires l’une de l’autre. Car, à chaque moment du temps, les doctrines dépendent de l’état de l’enseignement, qu’elles reflètent alors même qu’elles réagissent contre lui, et, d’autre part, dans la mesure où elles exercent une action efficace, elles contribuent à le déterminer.

La culture pédagogique doit donc avoir une base largement historique. C’est à cette condition que la pédagogie pourra échapper à un reproche qu’on lui a souvent adressé et qui a fortement nui à son crédit. Trop de pédagogues, et parmi les plus illustres, ont entrepris d’édifier leurs systèmes en faisant abstraction de ce qui avait existé avant eux. Le traitement auquel Ponocrates soumet Gargantua avant de l’initier aux méthodes nouvelles est, sur ce point, significatif : il lui purge le cerveau « avec