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longtemps prétendu que Delacroix ne savait pas dessiner et que ses tableaux n’étaient que des débauches de couleurs ? A-t-on assez reproché à Millet de faire des paysages ignobles et grossiers et des dessins impossibles à pendre dans un salon ? Et que n’a-t-on pas dit de la peinture de Corot ? Ce n’est pas assez fait, ce ne sont que des ébauches, c’est d’un gris sale, c’est peint avec des raclures de palette. Il est avéré que longtemps, lorsqu’un visiteur s’aventurait par extraordinaire dans l’atelier de Corot et que celui-ci, timidement, lui offrait une toile, le quidam la refusait, peu soucieux de se charger de ce qui lui semblait une croûte et de faire les frais d’un cadre. Si Corot n’eût vécu jusqu’à quatre-vingts ans, il fût mort dans l’isolement et le dédain. Et Manet ! on peut dire que la critique a ramassé toutes les injures qu’elle déversait