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bordée d’insultes. M. Whistler crut y voir ce que la loi anglaise qualifie de « libelle », et il appela M. Ruskin devant les tribunaux. Le procès Whistler versus Ruskin devint une cause célèbre dont tout Londres s’occupa. Les incidents de l’audience furent d’un haut comique. Le juge, les avocats et les témoins, transformés en esthéticiens, s’étendirent à l’aveugle sur l’art et la peinture. Les jurés, qui n’avaient peut-être jamais vu un tableau de leur vie, furent conduits devant un Titien, et l’on prétendit hic et nunc façonner leur goût, pour leur permettre de se prononcer avec connaissance sur les nocturnes de M. Whistler. Ils se tirèrent du reste d’affaire en gens d’esprit. Ils reconnurent M. Ruskin coupable de libelle, mais ne le condamnèrent qu’à un liard, one farthing, de dommages, ce qui voulait clairement dire aux peintres