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OURIKA.

il n’était presque plus à Saint-Germain que des instants ; il venait à cheval pour mettre moins de temps en chemin, il retournait l’après-dînée à Paris, de sorte que tous les soirs se passaient sans lui. Madame de B. plaisantait souvent de ces longues absences ; j’aurais bien voulu faire comme elle !

Un jour, nous nous promenions dans la forêt. Charles avait été absent presque toute la semaine ; je l’aperçus tout à coup à l’extrémité de l’allée où nous marchions ; il venait à cheval, et très-vite. Quand il fut près de l’endroit où nous étions, il sauta à terre et se mit à se promener avec nous ; après quelques minutes de conversation générale, il resta en arrière avec moi, et nous recommençâmes à causer comme autrefois ; j’en fis la remarque. « Comme autrefois ! s’écria-t-il ; ah ! quelle différence ! avais-je donc quelque chose à dire dans ce temps-là ? Il me semble que je n’ai commencé à vivre que depuis deux mois. Ourika, je ne vous dirai jamais ce que j’éprouve pour elle ! Quelquefois je crois sentir que mon âme tout entière va passer dans la sienne. Quand elle me regarde, je ne respire plus ; quand elle rougit, je voudrais me prosterner à ses pieds pour l’adorer. Quand je pense que je vais être le protecteur de cet ange, qu’elle me confie sa vie, sa destinée ; ah ! que je suis glorieux de la mienne ! Que je la rendrai heureuse ! Je serai