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OURIKA.

grande tante, autrefois religieuse, et qui, devenue tutrice de mademoiselle de Thémines, regardait comme un devoir de la marier, et voulait se presser, parce qu’ayant plus de quatre-vingts ans, elle craignait de mourir et de laisser ainsi sa nièce seule et sans appui dans le monde. Mademoiselle de Thémines réunissait tous les avantages de la naissance, de la fortune et de l’éducation ; elle avait seize ans ; elle était belle comme le jour : on ne pouvait hésiter. Madame de B. en parla à Charles, qui d’abord fut un peu effrayé de se marier si jeune ; bientôt il désira voir mademoiselle de Thémines ; l’entrevue eut lieu, et alors il n’hésita plus. Anaïs de Thémines possédait en effet tout ce qui pouvait plaire à Charles ; jolie sans s’en douter, et d’une modestie si tranquille qu’on voyait qu’elle ne devait qu’à la nature cette charmante vertu. Madame de Thémines permit à Charles d’aller chez elle, et bientôt il devint passionnément amoureux. Il me racontait les progrès de ses sentiments : j’étais impatiente de voir cette belle Anaïs, destinée à faire le bonheur de Charles. Elle vint enfin à Saint-Germain ; Charles lui avait parlé de moi ; je n’eus point à supporter d’elle ce coup d’œil dédaigneux et scrutateur qui me faisait toujours tant de mal ; elle avait l’air d’un ange de bonté. Je lui promis qu’elle serait heureuse avec Charles ; je la rassurai sur sa jeunesse, je