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ÉDOUARD.

était fort étendue ; il avait deux secrétaires qui travaillaient dans un de ses cabinets ; mais il me demandait souvent de rester dans celui où il écrivait lui-même. Il me parlait des affaires qui l’occupaient avec une entière confiance. Il me faisait quelquefois écrire un mémoire sur une chose secrète ou des notes relatives aux affaires qu’il m’avait confiées, et dont il ne voulait pas que personne eût connaissance. J’aurais été bien ingrat si je n’eusse été touché et flatté d’une telle préférence. Je devais à mon père les bontés de M. le maréchal d’Olonne ; mais ce n’était pas une raison pour en être moins reconnaissant. Je cherchais à me montrer digne de la confiance dont je recevais tant de marques, et M. le maréchal d’Olonne me disait quelquefois, avec un accent qui me rappelait mon père, qu’il était content de moi. Il est singulièrement doux de se sentir à son aise avec des personnes qui vous sont supérieures. On n’y est point, si l’on éprouve le sentiment de son infériorité ; on n’y est pas non plus en apercevant qu’on l’a perdu ; mais on y est si elles vous le font oublier. M. le maréchal d’Olonne possédait ce don touchant de la bienveillance et de la bonté. Il inspirait toujours la vénération, et jamais la crainte. Il avait cette sorte de sécurité sur ce qui nous est dû qui permet une indulgence sans bornes. Il savait bien qu’on n’en abuserait pas, et que le respect pour lui était un sentiment