Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/340

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


— Qu’il marche, je le suivrai reprit Françoise plus violente encore. Et vous croyez que, chez vous, c’est moi qui souffrirai le plus de nous deux ! Vous croyez que votre poing stupide, que vos insultes, vos menaces, vos yeux de reptile m’effraient ? Mais frappez-moi, foulez-moi aux pieds. Voulez-vous me tuer, voulez-vous une arme ? Charlotte, donne-lui un couteau. Tuez-moi. Si vous ne me tuez pas, jour et nuit je vous dirai que vous êtes un misérable lâche ; vous avez menti, trahi, vous avez volé ; assassinez maintenant, car au moins on vous traitera enfin selon vos mérites.

— Elle va se faire tuer, pensait Charlotte terrifiée.

En effet, les yeux de Joachim, fixes, aigus, cruels, étaient cloués au visage de Françoise et on y voyait l’intense, le forcené désir de faire taire cette voix, cette voix qui le dominait, à laquelle il ne savait répondre, tellement il la trouvait insensée, effrénée, et qui au fond lui faisait peur.

Mais la présence de Charlotte, les lieux inconnus, l’arrivée de la servante de Mlle Guay, à qui cette dernière dit aussitôt : « Allez chercher M. Bertrand (c’était le portier), pour qu’il me débarrasse d’un homme qui est entré ici de force, » se joignirent pour Joachim à la crainte secrète, indéfinissable, que lui causait l’exaltation de sa femme.

Se voyant encore contraint à reculer, ce fut en se retirant, par rage, et comme s’il se sentait à l’abri de lui-même et de Françoise, que la parole lui revint avec la menace :

— Oui, je vous ferai traverser Paris entre les gen-