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Joachim s’inclina et sortit. Il avait le sang au visage, les mains froides. Il eût étrangle Niflart s’il l’avait tenu. Il ne pardonnait pas non plus au ministre cette semonce hiérarchique. Ce ministre, un parvenu, que lui, Joachim, aurait à peine admis dans son salon trois ans auparavant, et qui le traitait avec une stupide insolence ! Et il fallait se courber ! Il eut envie de renoncer à toute carrière publique. Les affaires, les belles affaires, voilà par quoi on arrivait à la vraie indépendance, à la vraie puissance.

Il aurait voulu se plonger dans une rivière d’or et jeter des poignées de louis à la face des gens.

Joachim alla chez les agents de change devenus ses créanciers.

Joachim devait près de cinq cent mille francs. Il en fut étourdi.

Toute la Bourse ne s’occupait que de cet événement, et il était probable que les journaux en parleraient.

— Quel misérable ! quel invétéré coquin ! s’écria Joachim durant deux heures que prirent ses vérifications ; comment un honnête homme n’aurait-il pas succombé devant tant de perfidie ! Je vous paierai, messieurs, je vous paierai, soyez tranquilles. Donnez-moi quelques jours pour rassembler les fonds, répéta-t-il plus de vingt fois du ton le plus solennel.

Il eut à revenir à son hôtel pour réunir quelques papiers nécessaires au contrôle des opérations de Niflart. Il alla de nouveau jusqu’à la chambre de sa femme, et, du seuil encore, dit à Françoise :

— Je serai décidément ici ce soir, vers huit heures.