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— C’est moi qui ai pensé de telles choses ! se disait-elle, il faut les éloigner, car demain je serais capable de les penser encore. Non, le vrai est dans cette amitié profonde qui se porte sur tout l’être, sur tous les moments de sa vie, et non dans ce feu violent, allumé, consumé et éteint en un instant de folie.

Qui sait cependant si elle n’eût pas su plus grand gré à Allart d’avoir tenu à conserver cette lettre ?

Elle se rejeta avec plus de persévérance dans sa théorie de l’union des esprits.

De longs jours s’écoulèrent ainsi pour eux en une vie que, dans un moment d’ironique dépit contre lui-même, Allart appela le concert spirituel.

Ce n’est pas sans une lutte violente que Françoise maintenait son système, mais désormais elle n’eût pas faibli.

Et pourtant elle ne se reconnaissait plus, elle avait besoin d’un effort pour remonter le cours de sa vie antérieurement à l’arrivée d’Allart. Elle maudissait la niaiserie de jeune fille qui l’avait empêchée à cette époque de remarquer Philippe. Maintenant elle serait sa femme ! Au lieu de ce bonheur, elle en était peut-être séparée à jamais.

Cela l’amenait à être inquiète et jalouse de lui. Une autre femme ne pouvait-elle l’attirer ? Et alors elle se sentait brûler par les charbons ardents qui avaient échauffé sa main lorsqu’elle lui écrivit la terrible lettre, et elle sentait sa main avide prête à récrire de nouveau, et se voyait courant encore chez Allart et tombant vaincue à ses pieds. Elle aurait voulu qu’il la sollicitât