Page:Duranty - Le Malheur d’Henriette Gérard.djvu/98

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Va donc souffler les bougies de ma sœur, dit Aristide, ce sera amusant.

— Oui ! ton père se fâchera !

— Mais non, ça fera rire !

— Ta sœur ne sera pas contente.

— Elle ne dira rien, va donc ! »

Perrin se leva, marcha jusqu’au milieu du salon, et, voyant qu’on le regardait avec étonnement, n’osa plus ni avancer ni reculer. M. de Neuville lui fit un geste menaçant ; Perrin s’enfuit terrifié, et au moment où il voulut s’asseoir, Aristide trouva plaisant, pour troubler la musique, de lui retirer sa chaise. Perrin tomba sur le derrière, et Aristide jeta la chaise à terre avec un fracas épouvantable en criant :

« Fait-il du bruit, cet animal-là ! »

Corbie se mit à rire, à cause d’Henriette ; les autres se fâchèrent.

La jeune fille refusa de continuer. Perrin n’osait plus souffler, ni regarder personne.

« Si Henriette nous disait les derniers vers de Victor Hugo ? demanda le président.

— C’est donc le grand spectacle aujourd’hui ? » marmotta le frère.

Henriette récita ses vers avec une grande docilité.

Quand elle eut fini, Aristide s’écria :

« Fermez la serinette ! » Ce qui fit rire bruyamment de nouveau l’oncle Corbie.

Madame Gérard s’inquiéta de la contemplation enthousiaste où le président restait plongé devant Henriette, et, dans le subtil travail de son esprit, elle attribua les tendresses que le président avait eues pendant le jour à un reflet de son affection pour la jeune fille.

Le père Gérard s’endormait visiblement. Henriette en avait assez, elle reprit le prétexte de sa maladie pour se retirer.

Sa sortie occasionna un mouvement dont Aristide profita pour lancer Perrin dans une de ces expéditions périlleuses et burlesques qu’il aimait tant à inventer. Il lui dit : « Il y a un