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Je vous dis cela, Madame, parce que je crois que vous devez inspirer de la confiance. Je n’ai jamais vu une dame qui me revienne si bien, et on ne trouve pas beaucoup de personnes qui soient justes. Aussi, ça ne rend pas toujours la vie gaie que les autres ne fassent pas attention à vous. »

La petite avocate se régala de la galanterie d’Aristide, et pensa, elle aussi, à la vertu. Elle répondit :

« Oh ! je ne crois pas, Monsieur, qu’on ne vous rende pas justice. Votre conduite dans ces affaires est très approuvée à la ville. C’est vous qui avez découvert le germe du mal et empêché, par votre surveillance, des conséquences fâcheuses, bien qu’il soit toujours fâcheux pour une jeune fille que… Mais du reste, quant à mademoiselle Henriette, aucun soupçon ne s’attache à elle : la demande de M. Mathéus les a fait évanouir…

— Ah ! oui, dit Aristide, elle a été dire tout ça l’autre soir. Mais si j’apprenais, ajouta-t-il fièrement, qu’on répète quelque chose contre notre honneur, on aurait affaire à moi.

— On pense que mademoiselle votre sœur ne s’en tire pas mal, puisqu’elle épouse un homme qui a cent cinquante mille livres de rentes et qui lui donne trois cent mille francs de diamants !

— Sans moi, s’écria Aristide, excité à l’enthousiasme, Dieu sait ce qui serait arrivé !

— Cette pauvre mademoiselle Henriette ! reprit l’avocate, espérant toujours faire sortir de ce sujet les mots amoureux, ainsi qu’à force de battre un caillou on en tire du feu, cette pauvre mademoiselle Henriette ! comme les jeunes filles sont imprudentes ! Cependant, n’est-elle pas un peu excusable, si elle a été aimée ! »

Madame Vieuxnoir serrait peu à peu les mailles de son filet autour de l’esprit mal aiguisé d’Aristide. Elle ne réussit pourtant pas encore cette fois à lui ouvrir l’entendement. Il répondit :

« C’est égal, une fois partie de la maison, on sera bien plus tranquille !

— Elle n’est donc pas bonne ?