ramenant toujours avec acharnement ses pieds en arrière et se donnant un air de tête aimable, afin de retenir fixés sur son visage les yeux d’Aristide.
« Monsieur votre père, continua-t-elle, peut s’en reposer avec confiance sur madame votre mère.
— Oh ! dit Aristide enchanté de traîner partout son antipathie contre Henriette, entre eux deux ça va bien, mais il y a quelqu’un là-bas qui ferait damner cent curés. D’ailleurs, vous y étiez lundi !
— Oui, répondit la petite avocate avec prudence, je me rappelle vaguement ; je sais qu’il est question d’un mariage pour mademoiselle votre sœur. »
Elle était affriandée par la pensée d’obtenir tous les détails relatifs au scandale des Tournelles.
« Vous n’avez jamais rien vu de pareil. Elle fait endiabler toute la maison pour son petit va-nu-pieds. »
Ce dernier mot renouvela la torture des bas pour madame Vieuxnoir. Elle expiait sa tenue négligée par les craintes qu’elle en concevait à l’égard des amours.
« Elle n’y tient pas plus que moi, reprit Aristide, mais ça lui sert à faire de l’effet.
— Il paraît qu’il s’est présenté un très riche parti. Tout le monde trouve mademoiselle votre sœur fort heureuse… Mais, cependant, si elle aimait ce jeune homme ! dit madame Vieuxnoir, qui se sentait du respect pour l’amour en ce moment.
— Est-ce qu’elle est pour aimer, s’écria Aristide, ni celui-là ni un autre !
— En tout cas, c’est un événement rare dans la haute société, ajouta la petite femme. Connaissait-elle le jeune homme depuis longtemps ? »
Maintenant l’avocate tournaillait et cherchait à amener Aristide sur le terrain délicat de la passion. Mais quand il s’agissait de sa sœur, celui-ci ne songeait plus qu’à ses griefs ; aussi ne comprenait-il pas ce que l’avocate cherchait à lui faire comprendre.
« Tout ça, dit-il, c’est à ne pas s’y reconnaître ; c’est du calcul. Elle a toujours l’air de me mépriser, et, pourtant, si elle a manqué à la vertu, elle devrait bien changer de gamme.