ils croient que je me joue d’eux. Ils savent peut-être de mauvaises choses sur Émile et ne veulent pas me les dire, ou bien ils se taisent, parce qu’ils trouvent que ce n’est pas la peine de parler de ce qui n’était pas sérieux. Il faut bien se distraire de ces impossibilités, ne plus y penser ! »
Enfin elle arracha de sa pensée tous ses troubles et se mit à dessiner. Le soir on la vit presque pareille à Henriette d’autrefois. Elle se demanda même s’il n’y avait pas ainsi un réel bonheur à ne plus songer aux choses pénibles, et elle se laissa aller aux caresses générales qui lui furent faites.
Le curé avait été tellement excité par ses succès dans la négociation Baudouin qu’il se risqua à parler du président à madame Gérard, espérant éloigner cet homme dont la société était pour lui une perpétuelle absinthe.
Un jour, après que madame Gérard eut terminé sa confession habituelle, M. Doulinet lui dit :
« Voilà que vous allez marier mademoiselle Henriette ; ne serait-ce pas une occasion de satisfaire aux lois divines et humaines en rompant définitivement une liaison avec M. de… une liaison mal définie… qui prête à… que l’on interprète… Peut-être se trompe-t-on… mais la présence de cette personne… vos enfants… il est temps… Vous avez du courage… je vous soutiendrai… la religion… »
Il s’embrouilla.
« Mais, dit madame Gérard, vous voulez parler de notre ami le président. C’est le meilleur ami de la famille, rien que l’ami. J’ai confiance en Dieu quant au passé, et n’ai point à m’accuser pour le présent. Je vous remercie de votre excellente sollicitude. »
Le curé rentra dans le rôle de spectateur et n’osa plus en sortir.
Or le président lui en voulait déjà et l’accusait d’intrigues à propos de la réconciliation Baudouin. Si M. de Neuville avait connu la tentative expulsative du pauvre abbé, il l’eût tourné et retourné sur des charbons tellement ardents, que M. Doulinet n’aurait pu y tenir longtemps.
Pierre, lui, continuait à se perdre dans les complications de sa machine. Comme pour renouveler un supplice du Tartare