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mais j’espère que vous la connaîtrez telle qu’elle est, enjouée, bonne musicienne, artiste !

— Comment se porte-t-elle donc aujourd’hui ? Est-elle encore souffrante ? demanda Mathéus avec vivacité.

— Encore un peu, mais ce n’est rien, une sorte de coup d’air.

— Attrapé dans le parc, dit Pierre faisant pour lui seul une raillerie sur les amours de sa fille.

— Je suis bienheureux, reprit Mathéus en son langage élégant, d’avoir pris sur moi de fouler l’usage aux pieds et de m’être fait le propre interprète de mes vœux ; je n’aspire plus maintenant qu’à pouvoir les exprimer à mademoiselle votre fille et à voir arriver promptement le jour où notre union sera célébrée, car je pense que vous me permettrez d’être impatient.

— Oui, dit Pierre, nous nous convenons donc, affaire faite ! Une fois les questions de contrat réglées, nous marcherons aussi rondement que nous avons commencé. Il tarde toujours aux jeunes filles que la noce se fasse

— Moi aussi, dit madame Gérard, je suis d’avis d’en finir promptement. Ces attentes, ces préliminaires, sont fatigants. La position d’un prétendu est presque celle d’un solliciteur.

— C’en est bien un, dit Mathéus, souriant jusqu’au bout des ongles.

— Mon cœur de mère murmure contre une si prochaine séparation, mais il faut faire taire ces réclamations de la nature et ne penser qu’au bonheur des enfants. »

Après cette entrevue, madame Gérard ne fut plus préoccupée que de donner à Mathéus une représentation générale des avantages et talents d’Henriette. La séance fut fixée à trois jours de là.

Aristide était d’une joie et d’un entrain pleins de bruit et d’agitation. Sa sœur allait enfin quitter la maison ! Toutefois il ne la perdait point de vue et se tenait toujours à quelques pas de la maison, afin de voir si elle ne sortait point.

Il avait fabriqué avec Perrin des bâtons recourbés et ferrés, avec lesquels il lui persuada de creuser et de fouiller la terre,