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raisons suffisantes pour expliquer une installation aussi inattendue.

Louis Leforgeur passa donc un peu à l’état de bête curieuse dans le village, bien que les paysans lui témoignassent un certain respect, dominés qu’ils étaient par l’idée de ses richesses et de sa position de monsieur. Ils reconnaissaient facilement en lui un être supérieur aux personnages même les plus importants de Mangues.

Il est certain que la sagacité villageoise n’aurait pu deviner ni comprendre l’histoire de l’acquisition de la maison et du séjour du jeune homme dans cet endroit, où jamais n’était arrivée pareille aventure.


II


Louis Leforgeur était un être assez bizarre, plein de qualités et de défauts, et dont le caractère devait à l’excessive sensibilité de ses nerfs quelque chose de féminin.

Sa vie jusqu’à vingt-cinq ans avait semblé extérieurement endormie, car il ne quitta pas un seul instant sa famille, ne se lia jamais avec les autres jeunes gens, s’éloigna de tout le monde et passa ses journées dans l’étude et la solitude, sans s’inquiéter des accusations de sauvagerie qu’on portait constamment contre lui.

Son père et sa mère remplissaient consciencieusement tous les devoirs et suivaient les pratiques de la vie provinciale. Assez riches, ils ne cherchèrent pas à destiner