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Elle avait de longues marques enflammées, des écorchures, des meurtrissures au front et sur les joues. La vue en exaspérait Louis.

— C’est intolérable ! s’écria-t-il, cela aura un terme, je vous en réponds !… Et dites-moi au moins pour quelle cause…

— Eh bien !… c’est pour le mouchoir ! reprit Lévise d’un ton décidé et presque menaçant, comme si elle eût bravé son frère de loin.

À ce moment, Louis sentait qu’il était le protecteur obligé de Lévise, et une très profonde pitié remplissait ses yeux de larmes, car les souffrances de la jeune fille venaient de lui. Il n’eût désiré qu’une chose : étendre des tapis de velours sous les pieds de cette créature dont son esprit s’emparait comme d’un bien à lui, et le peu qu’il tentait de faire pour elle retombait sur la tête de Lévise en ennuis, en amertumes, en douleurs ! Mille idées lui passaient par le cerveau. Il eût voulu pouvoir écraser Volusien sous son talon. Il songeait à ne plus laisser rentrer Lévise chez elle. En même temps, il se dit rapidement que, par des scènes brutales, Volusien faisait entrer de force (le mot était bien juste) dans le cœur de Lévise le soupçon, et même, pourquoi non ? la certitude que Louis se conduisait envers elle comme un amant, que par là Volusien poussait la jeune fille dans les bras « du monsieur ».

Mais alors Louis ne concevait pas comment Volusien laissait revenir sa sœur, si les cadeaux lui déplaisaient. Louis se figurait que Lévise avait peut-être été enfermée et s’était échappée par une fenêtre, par-dessus une haie ! Aussi s’écria-t-il :

— Pourquoi donc vous a-t-il laissée revenir ?

— Il ne veut pas m’en empêcher, dit-elle étonnée, comme si la demande n’avait pas de raison d’être.