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— Euronique ! cria-t-il de nouveau avec violence.

La vieille ne se pressait point d’arriver. Enfin elle se décida à apparaître l’oreille basse, l’œil en dessous.

— Pourquoi avez-vous jeté les fleurs ? Qui vous l’a permis ?

— Elles étaient fanées.

— Vous prétendez que des fleurs cueillies toutes fraîches le matin et mises aussitôt dans l’eau sont fanées à trois heures de l’après-midi !

— Monsieur en aura de bien plus belles chez le jardinier ! Je l’ai fait pour le bien ! c’était trop commun pour la maison de monsieur, répondit la vieille sournoise.

— Pourquoi avoir dit à mademoiselle que je vous avais ordonné de jeter ces fleurs ? ajouta Louis exaspéré.

Euronique resta d’abord interdite, mais son trouble ne dura pas.

— C’était pour dire quelque chose ! répliqua-t-elle.

La réponse calma la colère de Louis, car elle était trop burlesque pour qu’on pût s’en fâcher.

— Prenez garde, dit-il sévèrement, je suis fort mécontent de vous, je ne supporterai pas longtemps une telle conduite.

Dès ce moment, Louis condamna intérieurement Euronique à être renvoyée ; mais la sérénité, reparue sur la figure de Lévise, causait trop de plaisir au jeune homme pour lui laisser exécuter sur-le-champ sa sentence.

Peut-être Louis « y regardait-il à deux fois » dans un pays tel que Mangues avant de renvoyer une excellente cuisinière.

Le jeune homme aurait bien dû se douter qu’Euronique était le criminel qui avait jeté les fleurs par la fenêtre,