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avoir du poil ! mais maintenant qu’est-ce que tu es ?…

— Sacrebleu ! cria Volusien, plus blessé que s’il avait reçu un coup de fusil, c’est bon ! le premier qui dira quelque chose, je l’étrangle ; mais je ne veux pas qu’il arrive de mal à Lévise.

— Parbleu, reprit Guillaume avec un rire insultant, tu t’es procuré des rentes !

— Guillaume ! cria Volusien hors de lui.

Mais le braconnier le regardait froidement et avec un tel mépris que Volusien en fut frappé et qu’il sentit invinciblement qu’il tombait trop bas dans l’estime de son ami. Il fut dominé par la conviction qui faisait de Guillaume une barre de fer. Il réfléchit, se troubla, vit la honte, l’insulte, la raillerie s’attacher à lui. Il souffrit autant que les gens de muscles peuvent souffrir moralement, et soudain Lévise, qui lui attirait ces humiliations, ces douleurs, lui parut exécrable et digne de châtiment. La chanson de Bagot, ses injures, le tableau que lui avait fait Guillaume du mépris même des enfants, le cri universel de lâcheté et d’infamie que son ami évoquait contre lui, l’enveloppèrent, éclatèrent à ses oreilles, à ses regards, et, bouleversé jusque dans les plus profondes racines de l’amour-propre, il vit, comme Guillaume, en Louis et en Lévise des êtres dont il fallait se venger.

— Écoute, Guillaume, reprit-il d’une voix sourde et les yeux baissés vers la terre, tu peux avoir raison ; eh bien ! aussi vrai que j’aime ma tranquillité, nous ne serons pas la fable de tout ce monde-là. Si ce que tu crois est vrai, eh bien, comme tu l’as dit, ça se paiera.

— À la bonne heure ! dit Guillaume, ça te regarde autant que moi !

Volusien réfléchissait depuis quelques secondes, en rai-