gardèrent avec précaution par un coin du rideau imperceptiblement soulevé s’éloigner la noce. Lévise était triomphante.
Le lendemain, elle entraîna Louis à une autre imprudence. Elle désirait avoir un petit chevreau orné d’un ruban et d’une clochette. Elle supplia Louis de l’accompagner chez une paysanne où elle en avait vu un très-joli qui était à vendre. Il y consentit, éprouvant d’abord un plaisir de vanité et de bravade à traverser avec la jeune fille les rues du village.
Lévise portait le fameux panier aux provisions qui avait toujours paru aux jeunes gens une enseigne aussi affirmative qu’un écriteau sur lequel eussent été écrits ces mots : Ne doutez pas un seul instant que cette paysanne ne soit la servante du monsieur de la petite maison. Mais quoiqu’elle portât ce panier qui était démesuré, la jeune fille n’avait certes pas l’air d’une servante. Il y avait de la soie, de la dentelle, une élégance de fête dans son costume, de la fierté dans son allure et sur son visage.
Louis se trouva bientôt mécontent. On les regardait avec des mines ébahies et les enfants ne reconnaissaient plus la Lévise pauvre d’autrefois. Louis sentit la critique aiguë des regards qui les suivaient. Il entendit quelques paroles maussades et désagréables. Mais il ne pouvait plus reculer. Il se mit au même pas que Lévise, et, ne tournant la tête ni à droite ni à gauche pour éviter les yeux ironiques et malveillants, il parla très-haut de façon que ses paroles, si on les entendait, établissent bien qu’elles s’adressaient de maître à servante. Lévise faisait de petits signes de tête aux gens de connaissance, ne s’apercevant pas dans sa gloire que la plupart n’y répondaient pas ! Chez la femme au chevreau, Lévise dit en entrant :