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— Eh ! la vieille bête ! riposta celle-ci.

— Bah ! il y a longtemps que tu en tiens, ma fille. Je le sais de loin. Va donc. Tu montres ton museau à la fin des fins, diablesse de fouine ! continua Cardonchas redoublant ses grimaces en guise d’amabilités.

— Il me dit des injures, ce bossu-là, répliqua la vieille à la fois en colère et minaudant, il me suit partout comme un chien, et il est toujours à renifler l’odeur de ma poêle. Si j’en tenais comme tu dis, vieux sac à méchancetés, il y a déjà longtemps que tu aurais mis ta patte dans mes pauvres écus. Ce magot qui croit que je fais attention à ses grimaces.

— Eh bien ! tope-là, la promise, reprit Cardonchas en lui tendant la main, c’est pour tout de bon, puisque tu cours la poste comme ça !

— Du tout ! le malin enjôleur ! fais voir ce que tu as de biens, d’abord. Donne un morceau de papier et une plume ; monsieur est assez bon pour écrire ce que tu as. Tu crois que je ferme les yeux et que la tête me tourne, peut-être !

Louis s’amusait. Il écrivit solennellement l’énumération des richesses des deux futurs. La fortune d’Euronique fut interminable à enregistrer. La vieille compta toutes ses douzaines de serviettes, tous ses poëlons, ses sacs de noix, ses pots de confitures, ses coiffes. Cardonchas pria le jeune homme d’évaluer son musée que Louis estima sans vergogne à cinq mille francs, de sorte que l’apport du petit danseur se trouva plus considérable que celui d’Euronique, au grand étonnement de celle-ci qui s’était toujours crue plus riche que « l’arcologue ». La vieille apportait six mille livres, et Cardonchas grâce aux antiquités, mettait en ligne huit mille francs !