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feindre. Il fallait calmer, dissiper ce chagrin, rassurer ce pauvre cœur accablé et effarouché.

— Vous êtes venu exprès ? demanda Lévise avec un mouvement de joie.

Mais elle craignait évidemment d’avoir confiance. Elle continua : Pourquoi seriez-vous venu exprès ? Quel besoin pouvez-vous avoir de moi ? Vous jouez avec moi sans vous inquiéter de ce qui retombe sur ma tête. Oh ! ajouta-t-elle dans un accès où il y avait du désespoir et de l’impatience, c’est la faute de mon frère ! c’est parce que je suis seule ! je n’ai personne pour me donner un conseil, pour me guider. Je ne sais ce que je fais, ce que j’ai à faire. Volusien me laisse aller, puis il se fâche, puis il change d’idée. Je fais mal sans le savoir. Oh ! je voudrais être bien loin d’ici. Toute seule ! tout à fait. Tous ceux que je connais, jusqu’à présent, m’ont tous jeté dans la peine. Tout le monde, sans exception, m’a fait souffrir. Dieu est contre moi. Dès que je crois qu’on est bon pour moi, je suis heureuse, je vais, je ne suis plus en garde et on en profite pour me nuire. Mais à présent je me garderai !

La plainte de Lévise, alla jusqu’au fond du cœur de Louis, renversant toutes les barrières qu’y avaient dressées la rancune, le doute, la circonspection, y soulevant la pitié, l’attendrissement et un chagrin plus grand encore que celui de la paysanne. Louis n’y tint plus ; des larmes vinrent à ses yeux et il parla avec une émotion singulière et naïve.

— Lévise, dit le jeune homme, Lévise, ma chère enfant, revenez auprès de moi, je serai votre ami mieux que je ne l’ai déjà été. Je ne vous ferai plus souffrir, je vous donnerai de bons conseils, je vous défendrai contre quiconque vous voudrait du mal, j’empêcherai que vous