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pouvoir de prévenir les mouvements de la chair, mais seulement de les étouffer à leur naissance. Elle ferma le ciel, en demandant qu’il ne plût pas avant de pouvoir réprimer son amc quand il désirait être vengé par la mort des faux prophètes de Baal ; car la langue nage dans un élément humide et enivrant, et devient facilement indiscrète[1] : d’où vient que le prince des apôtres renia son maître à la voix d’une servante[2]. Et l’on serre fortement les reins avec le cordon, pour châtier le corps et le réduire en servitude, et pour mettre un frein à l’impétuosité de la luxure. Enfin, pour ce qui se rapporte à notre chef (capitl nostro), c’est-à-dire au Christ, la ceinture du prêtre signifie ce que dit l’apôtre [saint] Jean : « M’étant retourné, je vis quelqu’un qui était semblable au Fils de l’homme, ceint, sous les mamelles, d’une ceinture d’or. » Par la ceinture d’or est désignée la parfaite charité du Christ, dont l’Apôtre dit : « La charité du Christ l’emporte sur la science ; elle brûle dans le cœur, elle rayonne dans les œuvres. » Voilà le sens de cette seconde ceinture dont Isaïe a parlé par avance, en disant du Christ : « La justice sera la ceinture de ses reins, et la foi le cordon qui serrera ses reins : car le Seigneur, qui est juste, a chéri la justice ; il a

  1. [Lingua etiam in humido sedet, et in madido, et facile lubricatur] On peut consulter avec fruit, sur cette opinion de Durand, un livre savant intitulé : [Consideratio physico-medico-forensis de saliva humana, qua ejus natura et usus, etc., perpenduntur, observationibus raris et selectis tradita, auctore D. Martino Gurisch ; Lipsiœ, 1729 ; in-4o, 1 vol. de 406 pages. (Voir l’intéressant compte-rendu fait sur cet ouvrage, dans la Bibliothèque raisonnée des ouvrages des savants de TEurope ; t. 3, 2e partie, mois d’octobre, novembre et décembre 1729, article 2, p. 263 à 278.)
  2. L’explication mystique que Gerson a donnée de ce passage de la Passion est trop belle pour que nous n’en citions pas au moins quelques lignes : « Gardez de ressambler icy {à) sainct Pierre, auquel une femme fist renoyer (renier) son maistre. Ceste femme est nostre très-maulvaise charnalité, qui souvent nous enhorte (pousse à) de laissier Dieu nostre Seigneur, par œuvres et par paroles… Comme maulvaise compaignie faut hayr, il appert icy, car quand sainct Pierre fut avec Jhésus-Christ, il fut ferme, et icy chiet (tombe). Et n’estoit pas merveille, sainct Pierre, se tu te chaufTois, car tu avoies ton amour desjà par dedans refroidie par la gellée de paour et de tristesse. » (V. Etudes sur les mystères et les Mss. de Gerson, par M. 0. Le Roy, p. 457.)