Page:Dupuy - Les Parques, 1884.djvu/42

Cette page a été validée par deux contributeurs.
36
les parques

Hommes plus dieux que nous, vous seuls la connaissez.
Même, après la saison des tendresses conquises,
Vous savez vous créer des tristesses exquises
Avec le souvenir de vos bonheurs passés ;
Ou, si l’amour s’abîme et que l’idole tombe
Sous le fer du mépris, sous le doigt de la mort,
Un autre feu jaillit de ce feu qui succombe,
Un sentiment plus haut, plus auguste et plus fort
Fixe son thyrse aigu dans votre âme en délire,
Et quand le plectre d’or retombe sur la lyre,
Terre et ciel, tout tressaille au son mâle qui sort.



Être humain, ta détresse attendrit la Nature.
Sa grande voix s’élève, et dit : « Ma créature,
Mon fils, que le tranchant de la vie a blessé,
Endors ton front pesant dans mes mains maternelles ;
Abrité sous mon voile aux grâces éternelles,
Fais un rêve plus beau que le rêve effacé.
Au lieu des pans obscurs d’une tente de toile,
Je t’offre, de la mer pourprée aux monts bleuis
L’espace, et le rayon bienveillant de l’étoile,
Le souffle de la grève et des bois réjouis,
Le mystère de l’aube aux yeux frais de rosée,