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qui suffit à l’homme, c’est-à-dire celle qui se fonde sur le bon sens et la raison. Ce n’est plus alors proprement de la religion, mais de la morale qu’il nous faut, et là-dessus nous sommes d’accord. Plus de morale appelée religieuse ; plus de ces affreux prêtres : et l’on en veut encore ! Mais la fable de l’Élysée et du Tartare ne se renferma pas toujours dans le cercle de la morale avouée de tous les peuples, et dans l’intérêt bien connu de toutes les sociétés. L’esprit de mysticité et la doctrine religieuse s’en emparèrent, et firent servir ce grand ressort à l’établissement de leurs chimères. Ainsi les Chrétiens ont placé à côté des dogmes de morale, que l’on retrouve chez tous les philosophes anciens, une foule de préceptes et de règles de conduite qui tendent à dégrader l’ame, à avilir notre raison, et auxquelles pourtant on attache les récompenses les plus distinguées de l’Élysée.

Quel spectacle, en effet, plus humiliant pour l’humanité, que celui d’un homme fort et vigoureux, qui par principe de religion, vit d’aumônes plutôt que du fruit de son travail ; qui pouvant, dans les arts et dans le commerce, mener une vie active, utile à lui-même et à ses concitoyens, aime mieux n’être qu’un benêt contemplatif, parce que la religion promet ses plus brillantes récompenses à ce genre d’inutilité sociale. Qu’on ne dise pas que c’est là un des abus de la morale chrétienne ; c’est au contraire sa perfection, et le prêtre nous enseigne que chacun de nous doit viser à la perfection. Un chartreux en délire, un insensé trappiste, qui, comme les autres fous, se con-