Ma muse attend aussi les beaux jours pour chanter.
Oh ! quand reviendront-ils ? Je me sens attrister.
Ressusciterez-vous pour moi, charmantes heures
Qui m’avez vu si riche en de pauvres demeures,
Riche de sentiments, riche d’illusions ?
N’étions-nous pas heureux, dis-moi, quand nous causions
De nos premiers espoirs, promesses avortées
Comme des fleurs de mars, pour s’être trop hâtées ?
L’absence n’avait pas élargi ce lien
Qui fait de l’un pour l’autre un mutuel soutien.
Que nous avions à deux de bonheur ! Les pleurs même
Semblent doux, essuyés par une main qu’on aime.
Mon frère, où donc es-tu ? je suis las d’être seul.
Aux bords où le platane, où l’orme, où le tilleul,
Si tristes maintenant, effeuillent dans le Rhône
Les débris jaunissants de leur pâle couronne,
Je crois errer encore avec toi, quand le soir
Nous arrachait tous deux à l’ennui du comptoir.
Sur de riches tissus, fatiguantes merveilles,
Tes yeux s’étaient lassés, et mes pauvres oreilles
Page:Dupont - Les Deux Anges, 1844.djvu/193
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.