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LUCILE, . 47 RD in em Eee de ON Rene an ue 0e.

relourner plusieurs fois la lête et de faire signe an jeune Mermet de venir le rejoindre, L'enfant se contenta, à cha cun de ces appels, de lever les épaules d'un air de mépr Horrible souvenir E Biunidt une épaisse fumée, d'où soi rent dix gerbes de flammes, deroba l'infortuné fils de notre défunt colonel à mes yeux!

Pauvre eufant | que de fois ton image ne m'est-elle pas apparue dans mes rêves! que de fois enfin le souvenir de ta mort affreuse n'a-1-jl pas aurislé mes plaisirs,


VII


Une hénre plus tard l'incendie du camp de Frelignd él complet; à moitié asphysié par la fumée et la choleur, je devais quilter ma cachetle, ;

J'étais tellement harassé de corps et abattu d'esprit que je dédaignai de prendre aucune précaulion pour assurer ma fuite. Je sortis de l'excavalion où je m'étais tenu blotti jus- qu'alors, sans souger à regarder auparavant si quelque Yendéen allardé ne se trouvait pas aux environs. Peu o'im- portait, dans mon état de prostration morale et physique, d'être fusillé. Teureusement pour moi que l'incendie du camp avait chassé au loin les brigands; au réste, en füt-il resié quelques-uns à rôder autour de Freligné, qu'il m'eût encore été facile, grâce aux épais tourbillous de fumée qui enveloppaient la campagne à une grande distance, de m'é- loigner sans être apercu.

Après une heure de marche, le hasard, je me trompe, je dais dire la Provideuse, me conduisit à l'entrée d'une forêt. A moilié suffoqué par l'atmosphère brûlante que je venais de traverser, je me hâtai de me réfugier dans celte oasis qui s'offrait si à propos à mes yeux, et je ne lardai pas à me ressentir de l'heureuse influence qu'exerça sur moi ce chan- gement de température. La vivifiunte fraicheur embaumée qui réguail daas la forét apporta un tel soulagement à mon Corps et à mon esprit, que je ne tardai pas à reprendre cou rage, Toutefois, avec le sentiment de mon être, la pensée de wa position me revint, et je commençai, la vie ne m'ap+ paraissant plus comme un fardeau , à penser de quelle façon je devais m'y prendre pour éviter de tomber entre les mains de l'ennemi,

Je commençai avant tont par mettre plus de prudence dans ma marche : au lieu d'évancer inconsidérénient el sans regarder devant moi, j'eus soin de me glisser derrière les arbres et de me baisser de vingt pas en vingl pes afin d'a- grandir mon horizon ; une branche Lombait-elle en froissant les feuilles, je m'arrètais court et je restais immobile : le bruit le plus insignifiant me cansait des frayeurs étranges,

J'étais ron-seulement eu proie aux angoisses de Pinquié- tude, mais encore à celles de la faim. Depuis la veille au soir, car Freligné avait élé allagué la veille au malin, je n'avais pris aucune nourriture. Le jour commençait à baisser el la nuit s’annonçail par un commencement de crépuscule quand je découvris un bosquet de noisetiers chargés deiruits, celle bonne anbaine me ranima tout à j

Quoique les noisettés qne je mangeai ne constitnassent guère, pour un homme affamé comme je l'étais, un repas suflisant, cela eut néanmoins pour résultat immédiat d'apaiser les tiraillements qui me torturaient l'estomac.

J'allais m'éloigner de ces bienfaisants noisetiars, quand un bruit de feuilles et de branches froissées, qui se D enten- dre à ne vinglaine de pas dé moi, attira nion attention et ie causa un violéut batiément de cœur,

— Qui vive? s'écria peu après une voix relentissante gaie le sou du ron. Qui vive ? N'avancez pas ou je fais eu |

Celle dernière recommandation était parfaitement inutile : la surprise ie tenait cloué au sol.

Toutefois, à un second appel plus menaçant encre quele Dieuier, je ï rits, et réfléchissant, que mourir pour mourir il Valait mieux que ce fat En brave qu’en lâche: Je lis un violent eflurt et je repondis d'un lon assez convenu ble: Soldat de la République Vive la patrie !


Al èst vrai qu'en prononçant ce rais comme étant ma condamnation à mort, je fermai invo= loutairement les yeux, n'attendant à recevoir le conp fatal.

endant quelle que ft mon émolion intérieure, ma con- lenance resta digne de mon uniforme, Lelecteur comprendra donc sans peine la joie immense que je ressentis en enteu- dant bientôt un « Vive la République ?» relentissaut répé- ter mon exclamalion avec la fidélité d'uu écho.

Presque aussilôt un homme, revêtu d'un uniforme bleu, sortit de derrière un buisson, et s'avança vivement à-ma rencontre,

— Gherche-à-Manger! m'écriai-je avec autant de joie que de surprise, en reconnaissant man capitaine.

— Tiens ! c'est vous, cher adjudant, me répondit-il en me serrant la main à me la briser, en signe de contentement. de vois qu'il est dans notre destinée de nous rencontrer dans les occasions solennelles ! Vraiment, je suis ravi de l'a- veiture,

— Vous me voyez, capitaine, ponr le moins anssi en- chanté que vous, lui répondis-je; mais comment se fait-il que j'aie le bonheur de vous relrouver ici ?

— Je pourrais, si je ne me trompe, vous adresser la même question, et voire présence en ces lieux doit vous expliquer li mienne, Comme vous, j'ai dû me sauver; senlement, ajouta Cherche-à-Manger après un léger silence, j'ai con servé mes armes, moi ! ÿ

— Tandis que j'ai perdu les miennes, j'en canvien: pitaine. Permellez-moi pourtant de vous faire observer qu'a- vaut de les jeter je m'en suis servi du mieux que j'ai pu.

— Je n'en doute pas, me répondit-il d’un lon radouci, et je vous demande pardon de vous avoir adressé ce reproche, Mais, voyez-vous, le souvenir de l'épouvantable échec que

subi, la pensée que je suis en fuite et.que je dois me cacher devant les brigands, m'exaspèrent au-delà de toute expression! Enfu, il faut bien se rendre à l'évidence des fils. Cependant, quoique vainen, je vous réponds que siun Vendéen passe à la porlée de mon fusil je le tuerai comme un chien enragé |

—— Gapitaine, chacun a le droit d'agir, sous sa propre responsabilité, comme bon lui semble.

— Tenez, me dit-il après avoir réfléchi pendant quete

ues instants, je vous conseille, adjudant, de ne pas essayer de pariager ma fortune et de vous séparer de moi t

— Pourquoi cela, mon cher capitaine ?

— Parce que, dans l'état d'exaspération où je eu dois fatalement, si nous rencontrons l'ennemi, compromet- tre voire sûreté d'une façon déplorable ! 11 vaut done beau coup mieux, — vous qui ne demandez qu'à vous cacher, — que vons continniez seul votre chemin Ce serait avec regret que je me conformernis taine, à votre conscil. Muis enfin, je m'y conformerais m'était ntile ; or, c'est là ce que je ne crais pas! C'est l'é- goïsme et l'esprit de conservation qui me forcent de vons suivre; Car, Sans vous, comme je ne connais nullement le pays, il me serait impossible de retrouver ma route et d’at- teindre une ville de garnison

— Au fait, vous avez raison. Restons ensemble! Si nous ne faisons aucune rencontre, ngus serons demain en sûreté à Machecoul! Si j'aperçois des Vendéens, vous savez ce que je vous ai dit... j'engage la bataille!

— C'est convenu, capitaine, Je vais prier Dien pur que vous ne réncoutrier pas de Vendéens.

Après celte réponse j'embollai mon pas sur celui du ea pitaine, et je me mis à le suivre au plus vite.

11 y açait à peu près une demi-héure que nons avancions silence, lorsque tout à coup une délonalion rotentit à ne faible distance de nous,

— Malédiction! s'écria Cherche-à-Mangor en portant vi- vement sa mxin gauche à son épaule droite et en laissant tomber son fusil, je suis touché !

Le premier moment, de la surprise passé, et j'avoue que celle surprise fut pour moi horriblement poignante, j'allai ramasser l'arme de mon malheureux compagnon, lorsqu'une dizaine de Vendéens apparurent, comme par enchanteinept;


roles que je considé-