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LES AMANTES DU DIABLE

Rassuré l’étranger se rapprochait.

— Je ne vous oublierai jamais, dit-il d’une voix chaude. Comment vous nommez-vous ?

— Jean Hocquin…

— Soyez assuré qu’un jour le bienfait que vous me rendez sera payé, et largement.

— Que devez-vous espérer ? dit le braconnier avec ironie.

— Sans doute, fit l’autre rasséréné, ne pouvez-vous pas vous rendre compte ici de la façon dont les choses marchent à Paris et autour du roi.

— Je n’en ai pas la moindre idée, fit le chasseur, mais je pense que c’est un peu comme partout.

— Pas du tout. Tout y repose sur la faveur et sur les amitiés.

» Je suis à cette heure un fugitif, mais le roi n’est pas immortel. Je puis être le bras droit de son successeur, et même, si sa maîtresse change, ou son premier ministre, il se peut que loin d’avoir, comme je l’aurais en ce moment, la tête coupée, je sois un jour en passe de devenir duc…

Babet eut une sorte d’aspiration lente et ses mains la brûlaient. Elle se dit secrètement.

— Satan… satan, enrichis-nous !

Un silence régna. Chacun suivait ses idées avec une sorte de tristesse âpre. Le sentiment de l’instabilité et de la changeante incertitude de tout ne peut apporter de consolation qu’aux âmes entraînées