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LES AMANTES DU DIABLE

retourne. Dans l’huis ouvert elle distingue une forme humaine qui s’approche rapidement.

Elle court au-devant de cet homme. Ce ne peut être que son mari. Elle s’arrête alors, figée, la bouche ouverte, les yeux fous.

Le survenant est un homme inconnu, et mieux même : un seigneur. Il est vêtu de panne écarlate, avec des broderies. Ses souliers sont fins et ornés de coins dorés. Il a oublié son épée, mais le fourreau reste. Sa cravate bouffante est immaculée, et soudain il quitte son chapeau :

— Madame…

L’inconnu s’incline avec une politesse qui sent son ironie.

— Madame, veuillez m’excuser !

Ils restent face à face, lui tête nue, avec sa perruque blonde et sa figure bien rasée, elle, émue aux limites de ses sentiments. C’est peut-être là une des images de Satan, qui aime tant à se déguiser ?

— Madame, reprend l’étranger, voulez-vous m’offrir un refuge chez vous ?

Elle hésite. Mais une sorte de tendresse, et elle ne sait quel secret désir la font agir presque sans le savoir :

— Entrez, monseigneur !

Il entre et regarde avec stupeur le contenu de ce gîte obscur. Il n’a jamais vu cela. Il croyait que tous les ruraux pouvaient vivre, prestige et épée en