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fut difficile, mais cela me servit. Puis je sautai, je me retrouvai sur le sol broussailleux et élastique de la forêt. Je marchai un peu pour me détendre, pensant le faire en cercle pour ne pas m’éloigner de la branche sauveuse.

Bientôt mon sang se remit à circuler. Je retrouvai la maîtrise de mes muscles. Mais c’est en vain, alors, que je cherchai « ma » branche, je ne la découvris plus.

Brusquement, comme, écarquillée et les bras levés, je tâtais désespérément en l’air, j’entendis à quelques pas un bruit net de progression. Un animal puissant ou un homme ?…

Je ne bougeai plus, la gorge serrée comme par une main. Le silence revint, mais je ne sais quel instinct caché me disait qu’un être était là, à quelques pas, me guettant.

Je m’accroupis, le cœur en tumulte. Autour de moi, rien n’était visible, étais-je visible, moi ?

Un instant se passa, puis le bruit de marche se répéta. Il s’approcha. C’était un pas allongé, lent et lourd. Horrifiée, je sentis cela venir à mon côté, puis s’arrêter juste à ma hauteur, et une main, une patte ou une main, se posa sur mon épaule.

Ma bouche sécha d’un coup. Ma gorge céda comme sous la garrotte d’Espagne, et, sur mon échine, une glace coula…

La main s’étendit, parcourut mon front, puis ma poitrine. L’homme devait être penché. Enfin il parla en magyar.

— Femme, petite fille. Que faites-vous ici ?

D’un violent effort, les dents serrées, contraignant à agir mes muscles rétifs, je me relevai. La main passa sur mon dos.

L’homme n’était pas le betyar d’Ida. Sa voix avait une sonorité plus lourde et il parlait lentement, comme un être déshabitué de la parole.

Je me commandai de dire quelque chose.

— Qui êtes-vous ?

Un rire léger me vint.

— Vous ne parlez pas bien, vraiment. Attendez !

Je vis sauter une étincelle, puis deux, puis dix, et enfin une lueur jaillit d’une sorte de corde enroulée dans une boîte pareille à une tabatière.